L’année dernière, j’ai découvert un roman fascinant qui s’est rapidement glissé parmi mes livres préférés : The Haunting of Hill House de Shirley Jackson (La Maison hantée en VF). L’histoire de départ est assez simple. Trois personnages, Eleanor, Theodora et Luke, sont invités par le Dr Montague, spécialiste du surnaturel, à passer quelques jours en sa compagnie à Hill House. Cette maison est réputée hantée et il souhaite l’inspecter. Ensemble, ils séjournent donc le temps de quelques jours à Hill House, à leurs risques et périls. L’histoire de Shirley Jackson, très psychologique, marque les esprits par sa façon insidieuse de s’immiscer dans l’esprit du lecteur. Elle a d’ailleurs mené à plusieurs adaptations que j’ai décidé de visionner dans l’ordre pour comprendre comment cette œuvre a réussi à inspirer deux films et une série télévisée sans pour autant tomber dans un schéma narratif répétitif. C’est parti pour une virée à Hill House où les démons du passé ne cesseront de pousser à bout les personnages à travers chaque adaptation.
Avant-propos : The Haunting of Hill House est un roman écrit par Shirley Jackson et publié pour la première fois en 1959. En France, il fut publié sous le titre Maison hantée en 1979. Par la suite, il a été réimprimé sous le titre Hantise en 1999. En 2016, il a été réédité dans une nouvelle traduction sous le titre La Maison hantée. Aujourd’hui, vous pouvez le retrouver aux Editions Rivage (collection Rivage Noir).
La maison du diable (1963) : l’adaptation la plus fidèle
Robert Wise est le premier à se lancer à l’assaut de The Haunting of Hill House en l’adaptant sur grand écran avec The Haunting, ou La maison du diable, en 1963. Dans les rôles principaux, on retrouve Julie Harris dans le rôle de Eleanor, Claire Bloom dans le rôle de Theodora, Richard Johnson dans le rôle du professeur et enfin Russ Tamblyn dans le rôle de Luke Sanderson.
Au niveau du scénario, il s’agit d’une excellente adaptation. La meilleure à ce point de vue là d’ailleurs, mais également ma préférée. Si le film date des années 60, il a très bien vieilli. La psychologie des personnages est travaillée en profondeur et l’atmosphère du roman est très bien retranscrite. C’est une réussite totale à mes yeux. Sans tomber dans le sensationnalisme, le réalisateur joue la carte de la suggestion : la tension est palpable et le malaise est croissant.
Sans de grands effets spéciaux et avec des moyens plutôt limités, le film réussit à tirer parti du noir et blanc, des sons et des décors aussi sompteux que terrifiants de Hill House pour recréer l’ambiance fascinante et pesante de l’histoire originale écrite par Shirley Jackson. Tout se joue dans l’invisible et les acteurs incarnent très bien leur rôle. Ce fut un vrai plaisir de découvrir ce film quelques mois après avoir refermé le roman.
Hantise (1999) : le film de trop
Presque 36 ans plus tard, La maison du diable est toujours connu pour être un chef d’œuvre de la tension et de l’horreur. Ce film marquant des années 60 va connaître un remake, toujours basé sur le roman The Haunting of Hill House de Shirley Jackson, réalisé par Jan de Bont en 1999 : Hantise (ou The Haunting). Dans les rôles principaux, Lily Taylor incarne le personnage d’Eleanor, Liam Neeson joue le rôle du Dr David Marrow, Catherine Zeta-Jones joue Theo et Owen Wilson incarne Luke Sanderson. Pour pouvoir rédiger cet article dans son ensemble, j’ai visionné chacune des adaptations dont il est question ici. Si je dois être honnête, Hantise est le film qui m’a le plus désarçonnée.
Lors de sa sortie en salles, le film a connu un accueil modéré de la part du public. Après l’avoir découvert, j’admets volontiers que je comprends plutôt bien pourquoi. J’avoue avoir plus ri devant ce film qu’avoir été épouvantée. Ce remake prend de grandes libertés quant à l’histoire, les personnages et même les actions prêtées à Hill House. Hantise a d’ailleurs reçu des prix lors des Razzie Awards 2000, une parodie de récompenses de cinéma qui distingue les pires productions, notamment dans les catégories plus mauvais film et plus mauvais scénario.
Pour en revenir au film en lui-même, celui-ci prend de très grandes libertés et s’éloigne tout aussi bien du roman de Shirley Jackson que de sa première adaptation La maison du diable de 1963. Le film de Robert Wise est en quelque sorte détourné dans un style blockbuster qui, malheureusement, lui retire tout son charme. La réalisation est assez “grossière” par rapport à l’histoire originale de l’autrice qui se voulait psychologique et surtout, suggestive. Ici, tout est montré à l’écran dans un étalement d’effets spéciaux, qui n’ont d’ailleurs pas tous particulièrement bien vieilli. Ici, on s’éloigne de l’horreur pour basculer davantage dans le fantastique. Initialement, l’œuvre de Shirley Jackson flirtait entre ces deux registres sans que l’un prenne le pas sur l’autre.
Au niveau du scénario, là encore, beaucoup de libertés sont prises et m’ont paru rendre le film assez… ennuyant. Toute la subtilité de l’œuvre originale est gommée, le film est lisse et en oublie presque l’essentiel : la peur. L’ambiance de maison hantée est absente et je suis restée stoïque devant ce film, dont j’attendais impatiemment la fin. En bref, Hantise est loin d’être une bonne adaptation du roman de Shirley Jackson, prenant beaucoup de libertés au niveau du scénario, et n’est pas non plus un remake réussi de La maison de diable de 1963. Le film n’apporte aucune profondeur à l’œuvre de l’autrice.
The Haunting (2018) : Hill House revisité à la sauce Netflix
Des années après, le roman de Shirley Jackson n’a pas fini d’inspirer les productions. Cette fois-ci, c’est une série télévisée qui prend sa source dans l’œuvre de l’autrice avec la première saison de la série d’anthologie d’horreur The Haunting : The Haunting of Hill House. Le titre ne fait pas dans l’originalité, on comprend tout de suite que cette saison, qui forme une histoire complète, est liée au roman du même nom. Cependant, cette fois-ci, il ne s’agit pas réellement d’une adaptation, mais plutôt d’une série inspirée de l’histoire de Shirley Jackson. Et finalement, c’est tant mieux !
La saison 1 de la série, créée par Mike Flanagan, se présente comme librement adaptée du livre original. Certains noms sont similaires, le principe de la maison hantée et de la tension psychologique repris, mais pour le reste, c’est une tout autre histoire qui prend vie à l’écran. On notera d’ailleurs un joli petit hommage à l’autrice avec un personnage qui porte son prénom, Shirley. S’éloigner de l’histoire originale n’est pas une mauvaise idée. Il serait difficile de faire mieux en terme d’adaptation que le film de Robert Wise La maison du diable de 1963. En prenant son indépendance par rapport au livre, la série offre un scénario nouveau et revisité qui permet de découvrir une nouvelle intrigue.
Ici, l’histoire se présente comme un drame familial horrifique. Cet angle, assez intéressant, distingue cette œuvre des deux autres citées précédemment. Cinq enfants, Steven, Shirley, Theodora, Luke et Eleanor, se retrouvent rattrapés à l’âge adulte par leur passé. En 1992, alors tous enfants, ils ont temporairement vécu dans un vieux manoir nommé Hill House. Un court été qui se terminera dans des circonstances très étranges et conduira à la mort de leur mère, Olivia. Vingt-six ans plus tard, une nouvelle tragédie les réunit et les forcera à affronter Hill House.
Personnellement, j’avoue ne pas avoir accroché avec cette série durant laquelle je me suis souvent ennuyée. Cependant, je reconnais qu’elle possède un bon nombre de qualités qui ont d’ailleurs séduit beaucoup de spectateurs. La réalisation est soignée et la série, plutôt bien découpée. Pour autant, l’horreur m’a paru assez esthétisée, ce qui m’a empêché d’entrer dans l’histoire pour réellement l’apprécier. Cependant, les acteurs, notamment les enfants, sont très convaincants et transmettent une vraie intensité. Si le premier épisode m’a séduite, j’avais l’impression que l’histoire n’avançait pas durant le reste des épisodes, ce qui m’a rapidement frustrée.
L’aspect drama familial de la série était un angle intéressant à exploiter qui offre une autre dimension au roman de Shirley Jackson et permet de montrer qu’un livre peut inspirer, sans forcément mener à une adaptation littérale.
En bref, le roman The Haunting of Hill House de Shirley Jackson a été une véritable inspiration pour le cinéma d’épouvante et plus récemment, la série d’anthologie horrifique The Haunting. D’une adaptation plus que réussie en 1963, à un remake un peu trop sensationnel en 1999 et jusqu’à une série librement adaptée par Netflix en 2018, le livre de 1959 offre un champ des possibles très large pour créer des œuvres psychologiques et fantastiques sur écran. L’adaptation que je retiendrai ici est sans hésiter le film La maison du diable de 1963 qui est une vraie réussite à mes yeux et permet de transposer à l’écran l’ambiance même du roman original.
Avez-vous déjà lu The Haunting of Hill House (Maison hantée) de Shirley Jackson ? Qu’avez-vous pensé de ces adaptations ?
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